Le cheik Ahmed Yassine, fondateur et leader spirituel du Hamas, servait de lien entre l'aile armée et les services d'entraide.
« En réponse á l'assassinat de chaque dirigeant de notre mouvement, nous tuerons 100 sionistes au moins. Nous ne sommes pas effrayés par les menaces d'assassinat, de destruction ou d'arrestations de l'ennemi, et nous sommes décidés á poursuivre la résistance jusqu'á la libération de notre terre. » extrait d'un communiqué (1er août 2002)
Niant á l'état hébreu le droit d'exister, il vise á plus long terme sa destruction, suivie de la création, á l'intérieur des frontiéres israélo-palestiniennes, d'un état palestinien islamique qui se poserait en leader du monde arabo-musulman. Par son engagement en santé et en éducation, il a su gagner la sympathie de nombreux Palestiniens, principalement dans la bande de Gaza, plus pauvre que la Cisjordanie. Ses agents sont particuliérement actifs dans les mosquées et dans les organismes caritatifs afin de recueillir des fonds et de recruter de nouveaux membres.
L'organisation a multiplié les attaques sur les cibles militaires et civiles israéliennes, mais aussi sur ses rivaux politiques, notamment ceux du Fatah, et sur les Palestiniens soupçonnés de collaboration avec Israël, recourant aux enlévements, aux commandos, aux assassinats et aux attentats á la bombe. Trés active en 1996, l'organisation a intensifié son action depuis septembre 2000, perpétrant les attentats-suicides les plus meurtriers. Selon les estimations, le Hamas compte de 750 á 1200 membres et jouit de l'appui de dizaines de milliers de sympathisants. L'Iran serait l'un de ses principaux commanditaires, mais son financement provient également de Palestiniens vivant á l'étranger et de sources privées d'Arabie saoudite et d'autres pays arabes. Le Hamas recueille aussi des fonds en Amérique du Nord et en Europe occidentale.
« Que c'est beau de tuer et d'être tué, non pas d'aimer la mort mais de se battre pour la vie, de tuer et d'être tué pour les vies de la génération suivante. » Mohammad al-Ghoul, auteur d'un attentat-suicide perpétré en juin 2002, revendiqué par le Hamas
Le Djihad islamique
« Notre djihad se poursuivra et d"autres coups seront infligés á l"ennemi sioniste. » communiqué émis aprés un attentat commis en octobre 2001
Plus petit que le Hamas mais encore trés actif, le Djihad islamique est responsable de plusieurs attentats sanglants perpétrés en Israël et dans les territoires occupés depuis la fin des années 80. Comme son nom l'indique, le groupe méne une guerre sainte destinée á fonder un état islamique passant par la destruction de l'« état sioniste » et le départ des « infidéles » juifs. S'inscrivant dans la mouvance islamique qui émergeait alors dans la région, le groupe fut fondé en égypte á la fin des années 70 par des étudiants palestiniens. Insatisfaits, ils avaient quitté les Fréres musulmans, qui plaçaient, selon eux, l'unité arabe avant la libération de la Palestine.
L'attentat á la bombe dans une pizzeria de Jérusalem-Ouest, en 2001, a été revendiqué par le Djihad islamique mais également par le Hamas.
« Cette opération héroïque, qui prouve que nos vaillants combattants peuvent franchir les barrages de sécurité sionistes, est une riposte aux crimes de l"ennemi et ses massacres commis contre notre peuple désarmé. » communiqué du 1er octobre 2001
Quoique d'appartenance sunnite, le groupe fut influencé par la révolution chiite iranienne de 1979, qui amena au pouvoir des hommes de religion, le premier modéle du genre dans le monde islamique. Proche des responsables anti-israéliens de l'assassinat du président Anour al Sadate, en 1981, le groupe fut expulsé du pays. Il s'implanta dans la bande de Gaza, oú il commença alors véritablement son action. Le meurtre d'un militaire israélien, survenu á Gaza en 1987, quelques mois avant la premiére Intifada, est le premier attentat qui lui est attribué. Les dirigeants du groupe furent expulsés vers le Liban, oú ils renforcérent leurs liens avec l'Iran, dont ils partagent davantage l'idéologie que le Hamas et le Hezbollah libanais.
Opposés aux états-Unis et á ses alliés occidentaux comme arabes, les dirigeants du groupe croient que la solution du conflit trouve sa réponse dans la confrontation armée. Formée de factions divisées en cellules, l'organisation concentre son action sur les attentats, sans jouer de rôle politique et social, comme peut le faire son rival, le Hamas. Opposé aux accords d'Oslo, le Djihad a saboté les efforts reliés au processus de paix en perpétrant de nombreux attentats dans les années qui ont suivi l'entente. Plus récemment, il a notamment revendiqué l'attentat-suicide qui a fait 16 morts dans une pizzeria de Jérusalem-Ouest, en août 2001. Depuis l'assassinat du dirigeant Fathi Chakaki, en 1995, prétendument par des agents des services secrets israéliens, le Djihad islamique est mené par Ramadan Abdullah Shallah. Le groupe reçoit un soutien financier de l'Iran et une assistance de la Syrie.
Le Front populaire de libération de la Palestine
« Nous demandons aux Arabes de frapper les intérêts américains, car les états-Unis participent á l'extermination du peuple palestinien. » Maher Taher, porte-parole du FPLP (août 2001)
En 1967, aprés la défaite arabe face aux Israéliens lors de la guerre des Six Jours, Georges Habache fonde le Front de libération de la Palestine (FPLP), issu du Mouvement nationaliste arabe. Antisioniste et anti-occidental, ce groupe radical combine le nationalisme arabe avec une idéologie d'influence marxiste-léniniste. Son objectif consiste á détruire Israël mais aussi á éliminer toute influence occidentale de la région. Particuliérement actif sur la scéne internationale dans les années 60 et 70, le FPLP adopte alors la stratégie des détournements d'avion pour faire connaítre sa cause. Le détournement simultané de trois avions, en 1969, constitue l'un de ses gestes d'éclat les plus connus.
En août 2001, l'armée israélienne procéde á l'assassinat d'Abou Ali Mustapha, chef du FPLP, lui attribuant la responsabilité de plusieurs attentats.
Les déchirements idéologiques ménent rapidement á la scission du groupe. Dans les années 70, il était la deuxiéme force de l'OLP, aprés le Fatah. Alors que le groupe de Yasser Arafat tentait de rallier les pays arabes á sa cause, le FPLP trouvait leurs dirigeants trop apathiques et cherchait plutôt á s'attirer le soutien de l'URSS et de la Chine. À l'aube des années 1980, il modifie sa stratégie pour se concentrer sur des cibles israéliennes et arabes modérées. Il perd peu á peu son influence au profit du Hamas, mais rejette lui aussi les accords de paix d'Oslo, conclus en 1993, et se retire de l'OLP. Aprés avoir boycotté les élections de 1996, le FPLP accepte, trois ans plus tard, de reconnaítre l'Autorité palestinienne, qui assume le pouvoir exécutif dans les territoires occupés. Aujourd'hui, le FPLP en fait partie.
En 2000, Abou Ali Mustapha succéde au fondateur, un changement perçu comme un retour aux années plus radicales. Il est assassiné par l'armée israélienne en août 2001. Quelques semaines plus tard, des membres du FPLP tuent le ministre israélien Rehavam Zeevi pour venger la mort de leur chef. Depuis, c'est Ahmad Saadat qui tient les rênes du groupe. Basé á Damas, en Syrie, le FPLP est également actif en Israël, dans les territoires occupés et au Liban. Il reçoit une aide logistique de son « pays hôte ». Ses membres sont évalués á 800.
Le Front démocratique de libération de la Palestine
« Les attaques contre les postes militaires, contre la présence coloniale dans les territoires palestiniens occupés sont plus efficaces. […] Elles portent des coups aux symboles de la colonisation israélienne. Notre but n'est pas de défaire l'armée israélienne. […] Pour nous, il n'est pas question d'essayer de faire disparaítre l'état d'Israël. » Daoud Talhami, membre du bureau politique du FDLP, dans une entrevue accordée á L'Humanité, en août 2001
Cinq militants du FDLP ont trouvé la mort dans l'explosion de leur véhicule, dans un attentat attribué á l'armée israélienne, en avril 2001.
Le Front démocratique de libération de la Palestine (FDLP), naít de la scission du FPLP, en 1969. D'idéologie marxiste-léniniste, le groupe croit que la libération du peuple palestinien viendra d'une révolution populaire. À plus long terme, il croit que les monarchies arabes doivent être renversées. Opposé au processus de paix, le FDLP méne, dans les années 1970, des attentats á la bombe et d'autres attaques en Israël et dans les territoires occupés. En 1988, on attribue au groupe l'attaque perpétrée contre la voiture d'Ariel Sharon, alors ministre de l'Industrie et du Commerce. Par la suite, le groupe méne surtout des opérations sporadiques aux frontiéres israéliennes.
Au début des années 1990, le FDLP se divise lui aussi, une faction réintégrant les rangs de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), l'autre devenant plus radicale. D'abord opposé aux accords d'Oslo, le groupe finit par en accepter le principe. Un de ses représentants s'est même joint á la délégation palestinienne présente lors des négociations de Camp David, aux états-Unis, peu avant le déclenchement de la deuxiéme Intifada, en 2000. S'opposant aux attentats-suicides et au culte du martyre, le FDLP privilégie les attaques contre les postes militaires. À titre d'exemple, en août 2001, un commando du FDLP a abattu trois soldats israéliens postés á proximité d'une colonie juive, dans le sud de la bande de Gaza. Il s'agissait de la premiére opération du genre contre une position militaire israélienne depuis le début de l'Intifada.
« Ces opérations de résistance mettent en lumiére le caractére colonial de la présence israélienne en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, et replacent le conflit dans son contexte réel, c'est-á-dire une lutte de résistance populaire contre un occupant et non un conflit ethnique ou religieux. » Daoud Talhami, membre du bureau politique du FDLP, dans une entrevue accordée á L'Humanité
Fondé et dirigé par Naif Hawatmeh, le FDLP est principalement actif dans les territoires palestiniens, en Syrie, oú il est basé, et au Liban. Il recevrait une certaine aide financiére et militaire de ces deux pays.
La superficie de l'état d'Israël est de 20 325 km2 (41 fois l'íle de Montréal). Il faut également compter les territoires occupés : le Golan, annexé en 1981, (1150 km2), la Cisjordanie (5879 km2, dont 4 % font partie de l'Autorité palestinienne depuis 1995), la bande de Gaza (378 km2, dont 336 km2 font partie de l'Autorité palestinienne et 42 km2 ont été réservés pour des colonies juives), et Jérusalem-Est, qui a été annexée en 1967.
Depuis le 31 juillet 2000, le chef d'état est le président Moshé Katzav (du Likoud, parti de droite). Mais la plupart de ses pouvoirs sont symboliques, les véritables pouvoirs étant détenus par le premier ministre. Depuis les élections du 6 février 2001, le premier ministre est lui aussi issu de cette formation politique. Ariel Sharon a remporté les élections avec plus de 20 points d'écart sur le premier ministre sortant, Ehud Barak, qui avait déclenché des élections anticipées.
Chronologie des événements qui ont mené á la fondation de l'état juif
Bien que l'état israélien ait été créé le 14 mai 1948, son histoire moderne remonte aux débuts du mouvement sioniste fondé, en 1897, par Théodore Herzl au congrés de Bâle, en Suisse. Quelque 200 délégués juifs d'Europe, d'Afrique du Nord, d'Amérique et d'ailleurs y signent l'acte de naissance d'Israël.
Les sionistes souhaitent la Palestine comme lieu du futur foyer national des Juifs. Mais cette terre appartient au sultan de Constantinople et lui seul peut l'accorder. Les dirigeants du mouvement sioniste s'emploient á persuader la Sublime Porte de « restituer » la Palestine aux Juifs. Ils proposent même de l'acheter. Dans les années qui suivent, plusieurs territoires d'accueil sont envisagés pour le futur état des Juifs : Chypre, le Sinaï, une colonie juive en égypte.
Le secrétaire d'état aux Colonies de Grande-Bretagne, Joseph Chamberlain, propose formellement l'Ouganda (en Afrique orientale). L'offre est de taille. Pour la premiére fois dans l'histoire du judaïsme, un état souverain accepte d'apporter une solution politique á la question juive. Aux yeux de certains, le lieu du futur foyer national importe peu. Si la Palestine n'est pas disponible, l'Ouganda ferait l'affaire. Mais pour plusieurs, dont Chaïm Wizmann, qui sera le premier président israélien, et David Ben Gourion, futur premier ministre de l'état, c'est en Palestine, berceau du judaïsme, que les Juifs doivent se rassembler.
À la veille de la Premiére Guerre mondiale, la Palestine compte 590 000 habitants, dont 57 000 Juifs.
Le 2 novembre 1917, Lord Arthur James Balfour, secrétaire d'état aux Affaires étrangéres de Grande-Bretagne, annonce que Londres « envisage favorablement l'établissement en Palestine d'un foyer national pour le peuple juif », ce qui encourage l'immigration juive, soutenue par le Fonds national juif.
Au lendemain de la Premiére Guerre mondiale, la Société des Nations confie á la Grande-Bretagne un mandat sur la Palestine pour aider les Juifs á « reconstituer leur foyer national dans ce pays ». Les Juifs continuent á s'implanter sur des terres rachetées á bas prix par le Fonds national juif. Bénéficiant de l'aide financiére de la diaspora et d'une bonne formation, les colons juifs sont soudés par leur volonté de faire fructifier la Terre promise des Hébreux. La fracture avec les Arabes palestiniens s'agrandit au fur et á mesure qu'augmente le niveau de vie des colons et que s'accroít leur nombre.
1920 – La Conférence de San Remo confirme la déclaration Balfour.
1922 – Premiére révolte arabe et premier Livre blanc britannique, qui exclut l'idée d'un état juif.
1927 – Création de l'Agence juive chargée de l'émigration des Juifs en Palestine.
1929 – La violence entre Juifs et Arabes devient systématique.
1933 – Adolf Hitler prend le pouvoir en Allemagne et l'immigration des Juifs européens, fuyant les persécutions nazies, s'accélére.
1936 – Début d'une révolte générale des Arabes contre les Juifs. Ces derniers organisent leur milice d'autodéfense, la Haganah. Aux attentats arabes contre les colonies juives répondent les attentats perpétrés contre la population arabe par l'Irgoun, organisation clandestine sioniste extrémiste. À partir de 1939, les actions terroristes de l'Irgoun sont également dirigées contre les fonctionnaires britanniques.
1937 – La Grande-Bretagne propose une partition de la Palestine, ce que refusent les sionistes.
1939 – Le gouvernement britannique publie un Livre blanc interdisant l'achat de terres par les Juifs et limitant l'immigration á 75 000 personnes sur cinq ans. Une immigration illégale est alors organisée et la Haganah recourt á son tour au terrorisme.
1947 – L'affaire de l'Exodus marque le début d'un conflit ouvert entre Juifs et Britanniques. Le bateau Exodus, transportant des Juifs vers la Palestine, est repoussé devant les côtes palestiniennes par la marine britannique. La Grande-Bretagne décide de se retirer de la région et confie la question de l'avenir de la Palestine aux Nations unies.
Le 28 avril, l'Assemblée générale de l'ONU charge une commission d'enquête spéciale de lui faire des recommandations. Le United Nations Special Committee on Palestine (UNSCOP) est composé de représentants de 11 états « non directement concernés » (Australie, Canada, Guatemala, Inde, Iran, Pays-Bas, Pérou, Suéde, Tchécoslovaquie, Uruguay, Yougoslavie). L'UNSCOP remet ses conclusions en septembre et recommande la création de deux états en Palestine.
Le 29 novembre 1947, l'ONU vote un plan de partage. Trente-trois pays votent pour, 13 contre et 10 pays s'abstiennent. Le plan prévoit un régime de tutelle internationale pour Jérusalem (100 000 Juifs et 105 000 résidents arabes), garantit les droits des minorités et les droits religieux, y compris le libre accés aux Lieux saints et leur préservation. Le plan prévoit également l'union économique entre les deux états : union douaniére, systéme monétaire commun, administration unique des principaux services, accés égal aux eaux et sources d'énergie.
Le plan est accepté par les dirigeants sionistes, mais refusé par les Arabes palestiniens et par les états membres de la Ligue arabe. Les combats s'intensifient entre les deux communautés.
15 mai 1948 – Le mandat britannique prend fin. Le même jour, David Ben Gourion proclame l'indépendance de l'état d'Israël. La proclamation dit : « En tant que membres du conseil national représentant le peuple juif en Palestine et le mouvement sioniste mondial, nous nous sommes réunis solennellement en ce jour de l'expiration du mandat britannique sur la Palestine pour proclamer l'établissement d'un état juif en Terre sainte, lequel portera le nom d'Israël conformément aux droits naturels et historiques du peuple juif et á une résolution de l'Assemblée générale des Nations unies. »
LES PALESTINIENS
« Je demande personnellement, en mon nom et au nom de mon peuple, au Canada et au premier ministre Jean Chrétien, qui est du fond de mon cÅ“ur mon ami, d'agir rapidement pour sauver la Paix des braves que j'ai signée avec mon partenaire Yitzhak Rabin. » Yasser Arafat, dans une entrevue publiée dans La Presse du 10 août 2002
Début de la deuxiéme Intifada
En juillet 2000, l'impasse des discussions de Camp David, aux états-Unis, a exacerbé les tensions déjá palpables entre Israéliens et Palestiniens. Ces derniers ont alors l'impression qu'on exige d'eux trop de concessions, alors que c'est Israël qui occupe leurs territoires. C'est dans ce contexte que survient, en septembre, la visite du leader du Likoud, Ariel Sharon, sur l'esplanade des Mosquées, á Jérusalem-Est. Les Palestiniens perçoivent son geste comme une véritable provocation. Les premiers affrontements éclatent le jour même : la deuxiéme Intifada vient de commencer. Aux pierres lancées par les Palestiniens répondent les coups de feu des soldats de Tsahal. C'est rapidement au tour de la Cisjordanie et de Gaza de s'embraser. Au fil des jours, les accords de cessez-le-feu se multiplient sans être respectés sur le terrain. Les esprits s'échauffent, comme le démontre cette foule qui bat a mort deux soldats israéliens, á Ramallah, á la mi-octobre 2001. Aprés des semaines puis des mois de conflit, même les plus modérés se radicalisent. Un an et demi aprés le début du soulévement, la deuxiéme Intifada est déjá plus meurtriére que la premiére, qui avait pourtant duré quelques années.
« Notre peuple poursuivra l'Intifada Al-Aqsa jusqu'á ce que nous hissions le drapeau palestinien sur chaque mosquée, sur chaque église et sur les murs de Jérusalem. » Yasser Arafat, 29 mars 2001, au lendemain de la premiére opération militaire d'envergure lancée par Ariel Sharon contre les Palestiniens
Le 30 septembre 2000, á Gaza, Mohammad al-Doura, âgé de 12 ans, est tué par des tirs israéliens. Il meurt dans les bras de son pére, qui n'a pas réussi á le protéger. Ces images captées par un caméraman feront le tour du monde et souléveront la colére des Palestiniens. L'enfant, qui a malgré lui payé de sa vie le combat avec les Israéliens, devient aussitôt un symbole pour les siens. La télévision nationale palestinienne diffuse et rediffuse quotidiennement les images de sa mort. Le jeune al-Doura sera l'un des nombreux enfants victimes des affrontements.
« Cela a été son sacrifice pour notre patrie, pour la Palestine. » la mére du jeune Mohammad al-Doura
Extrémisme palestinien
« Seul le djihad est capable d'assurer la victoire en Palestine. » extrait d'un communiqué du Hezbollah, le 2 mars 2002
le cheikh Ahmed Yassine, fondateur du Hamas
Refusant de reconnaítre á Israël le droit d'exister, les extrémistes palestiniens islamistes continuent de s'opposer farouchement au processus de paix et alimentent l'escalade de la violence en commettant de sanglants attentats. Pour eux, seule la guerre sainte fera triompher les droits des Palestiniens. Ils prônent la création d'un état palestinien fondé sur l'islam. La normalisation des relations avec l'état hébreu n'est même pas une option envisageable. Les dirigeants islamistes voudraient répéter l'exploit du Hezbollah libanais. (Pendant les 22 ans d'occupation israélienne au Liban, ce groupe armé a infligé á l'état hébreu de lourdes pertes en vies humaines. Le 24 mai 2000, Tsahal évacuait ses troupes du sud du Liban, un geste interprété comme une victoire du Hezbollah face á la puissante armée israélienne.
Le terrorisme palestinien n'est pas que religieux
Certains groupes armés ne sont toutefois pas islamistes. C'est le cas des Brigades des martyrs Al-Aqsa (proches du Fatah de Yasser Arafat), en voie de devenir le fer de lance de la résistance palestinienne. Il s'agit d'un groupe laïc dont les actions reposent sur des motivations politiques et non religieuses. Elles ont été mises sur pied pour venger les Palestiniens morts au cours des affrontements survenus prés de la mosquée Al-Aqsa, sur l'esplanade des Mosquées, á Jérusalem-Est, au début de l'Intifada de septembre 2000.
Se tuer au nom d'Allah ou de la patrie
Traditionnellement, les kamikazes se tuaient au nom de leur religion. Fait nouveau, les groupes armés laïcs revendiquent de plus en plus des attentats-suicides, se sacrifiant pour une patrie qu'ils voudraient voir exister.
Rapidement, les groupes palestiniens ont imposé la stratégie des attentats-suicides, qui se sont multipliés par dizaines au fil des mois. Ces attentats, toujours menés contre des innocents dans des lieux publics israéliens, sont actuellement le pire ennemi de tous les processus de paix intervenus dans la région.
Immanquablement, quand apparaít une perspective de paix, si mince soit-elle, un attentat-suicide est commis. Les chefs n'éprouvent aucun mal á recruter des militants prêts á donner leur vie contre Israël.
D'oú partent les attentats-suicides?
Depuis le début de l'Intifada, des dizaines d'attentats-suicides ont été perpétrés. Plusieurs des groupes qui les organisent, comme le Hamas et le Djihad islamique, ont leurs bases dans la bande de Gaza. Cependant, les militants qui les ont commis sont tous partis de Cisjordanie. Aucun n'est venu de la bande de Gaza, déjá clôturée par Israël. C'est ce qui explique la décision d'Israël de construire un mur de huit métres de haut pour isoler la Cisjordanie de la même façon.
Un jour, c'est un chauffeur d'autobus qui fonce sur une foule d'Israéliens. Un autre jour, un Palestinien bardé de dynamite fait une vingtaine de morts dans une foule massée á l'entrée d'une discothéque de Tel-Aviv. Autre exemple parmi les attentats meurtriers, celui perpétré dans une pizzeria située en plein cÅ“ur de Jérusalem. Ce sont principalement le Hamas, le Djihad islamique, le Front de libération de la Palestine (FPLP) ou même la Brigade des martyrs d'Al-Aqsa qui les revendiquent, légitimant chaque fois leurs gestes par les derniéres représailles israéliennes.
Les groupes palestiniens adoptent également la stratégie des attentats á la voiture piégée contre les Israéliens. Ce type d'attaque est généralement revendiqué par le FPLP et le Djihad islamique. Des véhicules chargés d'explosifs sont stationnés devant des rues passantes ou devant des cibles militaires; la détonation est activée á distance ou á retardement.
« Que c'est beau de tuer et d'être tué, pas d'aimer la mort mais de se battre pour la vie, de tuer et d'être tué pour les vies de la génération suivante. » Mohammad al-Ghoul, auteur d'un attentat-suicide perpétré en juin 2002
Dans le but de mettre un terme aux attentats, l'état hébreu procéde á l'assassinat ciblé de dizaines d'activistes et de responsables palestiniens, exacerbant un peu plus la colére des Palestiniens, qui crient chaque fois vengeance. Lorsque le chef du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), Moustapha al Zibri (mieux connu sous le nom d'Abou Ali Moustapha), est tué, la tension est á son comble. C'est la premiére fois qu'Israël s'en prend directement au chef d'une faction de l'OLP. Pour se venger, des militants du FPLP assassinent, á la mi-octobre 2001, le ministre israélien du Tourisme, Rehavam Zeevi, un ministre radical. Le conflit atteint alors de nouveaux sommets.
Le culte du martyr
Les militants qui se sacrifient pour la cause palestinienne sont en grande majorité des hommes dans la vingtaine ou un peu plus jeunes. Mais des femmes et des adolescents se sont aussi convertis en kamikazes. La plupart sont affiliés aux groupes islamiques armés du Hamas et du Djihad islamique. Ils sont souvent recrutés dans des écoles, des mosquées et d'autres institutions religieuses. Ceux qui se tuent au nom d'Allah croient que leur sacrifice leur garantira une place d'honneur au paradis. De tels ennemis, qui ne reculent devant rien, pas même devant leur propre mort, sont difficiles á contrôler par Israël. Fait troublant, nombreux sont les enfants qui disent avoir hâte d'atteindre l'âge oú ils pourront, á leur tour, devenir martyrs.
Ceux qui meurent sous les balles israéliennes ou dans des attentats-suicides deviennent des héros aux yeux de la population palestinienne. Des milliers de personnes participent aux processions lors des funérailles. Au milieu des tirs des fusils, la foule transporte á bout de bras le corps du défunt, enveloppé dans le drapeau palestinien. Le visage est laissé á découvert, afin d'ajouter au drame.
« Je serai le prochain martyr. […] Je réduirai leurs corps et leurs os en miettes afin qu'ils connaissent le goût de la mort. […] Nous tuerons les sionistes, les occupants, en l'honneur des martyrs, en l'honneur
« Crimes contre l'humanité »
« Les attentats á l'endroit de civils violent les principes fondamentaux de l'humanité définis par le droit humanitaire international. » Amnistie internationale
« Crimes contre l'humanité », « crimes de guerre », voilá comment Amnistie internationale qualifie les attentats-suicides et les autres formes d'attaques palestiniennes á l'endroit de civils israéliens. Généralement plus encline á critiquer Israël, l'organisation dénombre 128 attaques dans lesquelles ont péri au moins 350 civils, dont 60 enfants, depuis septembre 2000. Ces attaques sont des attentats-suicides, des attentats á la bombe, des fusillades ou des attaques á l'arme blanche.
La population palestinienne
« Sharon, Sharon, tu auras notre réponse. » phrase scandée par des milliers de Palestiniens qui participaient aux obséques d'une femme et de ses trois enfants, tués á Ramallah, en mars 2002
Avant même la reprise des hostilités, en septembre 2000, les Palestiniens se sentent lésés par la colonisation juive (qui s'est étendue depuis la signature des accords d'Oslo, en 1993), par l'occupation israélienne de certains de leurs territoires et par le probléme des réfugiés palestiniens. Les représailles israéliennes, notamment les incursions militaires dans les territoires et même dans des camps de réfugiés, ainsi que les bombardements, qui font des victimes parmi les civils, cimentent l'appui de la population palestinienne aux combattants islamistes, perçus comme des groupes de résistance armée face á l'occupation étrangére.
Les organisations humanitaires dénoncent les opérations israéliennes. L'organisation Médecins sans frontiéres soutient pour sa part qu'on empêche les services d'urgence et le personnel médical de secourir les blessés dans les territoires palestiniens. Selon les organisations palestiniennes, le tiers des victimes palestiniennes ont moins de 18 ans.
Opération « Rempart »
Entre le 29 mars et le 10 mai 2002, peu aprés un attentat ayant fait 22 victimes á Netanya, l'armée israélienne lance l'opération « Rempart ». Il s'agit de la plus vaste offensive en Cisjordanie depuis juin 1967. Les troupes de Tsahal occupent notamment Jénine, Bethléem, Ramallah et Naplouse. Les journalistes se voient refuser l'accés á certains sites.
Jénine
Les troupes israéliennes pénétrent entre autres dans le camp de réfugiés de Jénine, ville qu'elles considérent comme le sanctuaire du terrorisme palestinien. Entre le 3 et le 12 avril, Tsahal et les militants palestiniens se livrent une lutte acharnée, au cours de laquelle Israël perd une vingtaine d'hommes et soutient avoir tué quelques dizaines de terroristes. Les Palestiniens alléguent plutôt que quelque 500 personnes ont été tuées au sein de la population, et ils accusent les Israéliens de massacres.
Selon l'Office de secours aux réfugiés palestiniens (UNRWA), les autorités israéliennes ont empêché les sauveteurs d'accéder au camp, oú des résidents ont été ensevelis vivants sous des immeubles effondrés, et ont fermé l'entrée aux engins de déblaiement. L'envoi d'une équipe d'établissement des faits de l'ONU (résolution 1404 du Conseil de sécurité de l'ONU, qui découle de l'initiative du secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan) se heurte au report, puis au refus catégorique d'Israël. Menant leur propre enquête, les organisations de défense des droits de la personne parlent de violations des droits de la personne, de crimes de guerre et d'utilisation de boucliers humains.
« C'est comme si on était dans une zone de séisme, mais cela apparaít á la fois encore plus terrible et plus affreux. C'est presque incroyable que cela ait pu être fait par des êtres humains. »
Pour nuire á la liberté de mouvement des combattants palestiniens, les Israéliens multiplient les points de contrôle et les bouclages de villes, perçus par les Palestiniens comme des humiliations supplémentaires. Ces mesures de sécurité ont été la source de plusieurs incidents, dont certains mortels. Contraintes d'accoucher sur les lieux, plusieurs femmes enceintes, par exemple, ont perdu leur bébé. Se disant victimes d'abus de la part des soldats, les Palestiniens réclament l'arrivée de forces internationales pour les protéger.
L'économie palestinienne exsangue
Depuis le début de la deuxiéme Intifada, en 2000, le niveau de vie des Palestiniens a atteint un creux sans précédent. La circulation des marchandises et des matiéres premiéres est elle aussi entravée. Selon l'ONU, le bouclage des territoires palestiniens cause des pertes quotidiennes estimées á 11 millions de dollars américains par jour et provoque la perte de dizaines de milliers d'emplois. Avant le début de la crise, en septembre 2000, quelque 125 000 Palestiniens travaillaient en territoire israélien. La crise maintient ainsi les Palestiniens dans un chômage endémique (plus de 50 %) et dans des conditions économiques difficiles. Ainsi, prés de 65 % des familles vivent sous le seuil de la pauvreté, et 4 foyers sur 10 reçoivent moins de 200 $ par mois. L'Autorité palestinienne a quant á elle cessé de verser les salaires. Par ailleurs, dans l'ensemble, le coût des soins aux blessés de même que les dommages occasionnés aux édifices totaliseraient plusieurs centaines de millions de dollars américains. Pour reconstruire, l'injection de un demi-milliard de dollars sera nécessaire.
600 millions retenus par Israël
Fin juillet 2002, aprés une opération militaire trés critiquée par la communauté internationale, Israël a annoncé une série de mesures destinées á améliorer le niveau de vie de la population palestinienne. Le gouvernement Sharon s'est engagé á dégeler une partie de la somme de 600 millions de dollars destinée á l'Autorité palestinienne. Retenus depuis janvier 2001, ces revenus fiscaux proviennent principalement des taxes et des droits de douane prélevés sur les produits importés dans les territoires palestiniens, mais devant passer par Israël. L'état hébreu accepte cette mesure, á condition que cette somme serve á aider les Palestiniens qui en ont besoin et non á financer les attentats.
Problémes de malnutrition
Selon une étude de l'Agence américaine pour le développement international (USAID) achevée en juillet 2002, 30 % des enfants palestiniens de moins de 6 ans souffrent de malnutrition. Cette proportion n'était que de 7 % en 2000. Prés de la moitié d'entre eux et la moitié des femmes en âge de procréer souffrent d'anémie, allant de faible á modérée. Environ la moitié de la population dépend de l'aide alimentaire pour couvrir ses besoins quotidiens. L'étude a été menée auprés de 1000 Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie.
Dissidence chez les Palestiniens
Si les opérations militaires israéliennes justifient, selon plusieurs Palestiniens, les attentats-suicides, certaines voix dissidentes émergent, comme en fait foi une lettre signée par une cinquantaine d'intellectuels palestiniens, publiée dans le journal Al Quds, en juin 2002. Et ceux qui s'opposent aux attentats sont toutefois souvent perçus comme des traítres.
« Les attentats-suicides intensifient la haine et agrandissent le fossé entre les peuples palestinien et israélien. […] Ces explosions ne contribuent pas á la liberté et á l'indépendance. Au contraire, ils donnent de la force aux ennemis de la paix du côté israélien et fournissent au gouvernement Sharon un prétexte pour continuer sa guerre brutale contre notre peuple. »
extrait de la lettre
Mis au point en août 2002 par le ministre israélien de la Défense, Binyamin Ben Eliezer, et le ministre palestinien de l'Intérieur, Abdelrazak al-Yahya, un nouveau plan de retrait est déjá contesté par les extrémistes palestiniens, mais aussi par une partie des Israéliens. Selon les termes de l'accord, les forces de l'ordre palestiniennes auront la responsabilité de préserver le calme dans les secteurs évacués par l'armée israélienne et d'empêcher qu'ils ne servent de base arriére á des attaques. Lorsque les violences auront diminué, l'armée pourrait se replier sur ses positions d'avant septembre 2000.
Yasser Arafat entre l'arbre et l'écorce
Le vieux dirigeant palestinien se retrouve coincé entre l'insatisfaction des Palestiniens et les exigences de l'état hébreu - et de son allié américain - en matiére de sécurité. Ces derniéres années, Arafat a été accusé par les siens, groupes extrémistes en tête, de faire trop de concessions aux Israéliens. De l'autre côté, Israël l'accuse de rester inactif devant le terrorisme palestinien, et même d'encourager la violence. Même s'il condamne les attentats perpétrés par des Palestiniens, c'est lui, et non les extrémistes, que le gouvernement Sharon blâme pour la tournure des événements. Certains observateurs font valoir qu'il lui est difficile de contrôler les franges extrémistes, d'autres arguent qu'il n'a pas fait preuve de suffisamment de fermeté. Un exemple : quelques jours aprés le début des affrontements, l'Autorité palestinienne libérait la majorité des détenus du Hamas, un geste vivement condamné par Israël.
« Nous devons les frapper. Nous devons leur infliger des pertes sévéres et ils comprendront qu'ils ne peuvent continuer á utiliser la terreur et á réaliser leurs objectifs politiques. » Ariel Sharon, 5 mars 2002
L'affaire du cargo Karine A
À peine 2002 est-elle amorcée qu'une nouvelle épine s'enfonce dans le pied du leader palestinien : l'affaire du cargo Karine A. Les autorités israéliennes interceptent dans les eaux de la mer Rouge un cargo rempli de 50 tonnes d'armes. Le gouvernement israélien affirme que le chargement provient d'Iran et qu'il est destiné á l'Autorité palestinienne. Yasser Arafat nie toute implication et finira par rejeter la responsabilité sur le Hezbollah libanais. L'affaire est trés mal vue á Washington, qui, á partir de ce moment, soutient davantage Israël.
Quant au président de l'Autorité palestinienne, le gouvernement israélien le déclare « hors jeu », refusant désormais de le voir comme un interlocuteur valable. Plusieurs options ont été envisagées par le gouvernement israélien pour se débarrasser de Yasser Arafat. Tout d'abord, on tenta de l'isoler en détruisant son réseau de communication et son quartier général de Ramallah. Puis Israël et George W. Bush, qui refusent de le reconnaítre comme un interlocuteur de paix, exigérent, pour poursuivre les pourparlers de paix, qu'il partage son pouvoir, ce qui fut fait avec la nomination de Mamoud Abbas comme premier ministre de l'Autorité palestinienne. Ce dernier démissionna toutefois de ses fonctions quatre mois plus tard. À court de solution, le gouvernement Sharon décida, en septembre de 2003, de l'exiler et même de l'assassiner. Le tollé provoqué chez les Palestiniens et dans la communauté internationale par cette déclaration força Israël á se rétracter.
« M'expulser? Je mourrai ici. » Yasser Arafat, 6 juin 2002
MAHMOUD ABBAS
En choisissant Mahmoud Abbas pour succéder á Yasser Arafat, les Palestiniens ont fait le choix du dialogue avec Israël. Ils ont aussi fait le choix de la modération et du pragmatisme, alors que tout espoir de paix s"éloigne, chaque jour un peu plus, des rues de Gaza secouées par les attentats islamistes et les incursions de l"armée israélienne.
C"est donc un politicien réputé modéré, un homme considéré tant par les états-Unis que par Israël comme un interlocuteur valable, qui aura la lourde tâche, en tant que président de l"Autorité palestinienne, de sauver ce qui reste de la Feuille de route pour la paix.
Né en 1935 dans la ville de Safed, en Galilée, Mahmoud Abbas doit s"exiler en 1948 en Syrie avec sa famille, comme bien d"autres Palestiniens chassés par la premiére guerre du Proche-Orient. établi á Damas, il y obtient quelques années plus tard une licence en Droit.
Cofondateur du Fatah
En 1958, l"année oú il compléte ses études d"avocat, Mahmoud Abbas rencontre Yasser Arafat et une poignée d"autres Palestiniens en exil et participe á la fondation du Fatah, acronyme inversé du « Mouvement de libération de la Palestine ».
Abbas, qui rejoint officiellement le Fatah en 1961, s"installe cette même année au Qatar pour y travailler comme fonctionnaire de l"émirat. Peu de temps aprés, Abbas se lance avec succés en affaires et fait fortune.
Le mouvement, qui se définit comme centriste et nationaliste palestinien, se concentre essentiellement sur la lutte armée contre Israël. Au lendemain de la défaite militaire arabe de 1967, le Fatah, ainsi qu"une pléiade d"autres mouvements de la résistance palestinienne, se rattache á l"Organisation de libération de la Palestine (OLP), assurant á Yasser Arafat et á Mahmoud Abbas des postes clés dans cette organisation.
Le partisan de la paix
C"est á partir des années 70 qu"Abbas, partisan du dialogue avec l"état hébreu, travaillera á la création des premiers liens informels entre l"OLP et certains cercles pacifistes de la gauche israélienne. Ce choix du dialogue entraínera toutefois de nombreux affrontements entre Mahmoud Abbas et la frange radicale du mouvement nationaliste palestinien.
Plutôt inconnu du grand public, Mahmoud Abbas devient une figure incontournable du dialogue de paix qui s"installe progressivement avec Israël. Il méne en 1977, avec le général israélien Mattityahou Peled, des discussions qui conduiront á l"élaboration du principe selon lequel toute solution au conflit devra passer par la création de deux états indépendants.
Une thése controversée
L"homme qui déclare en 1979 qu"« il n"y a pas de solution possible au conflit israélo-arabe sans un dialogue avec Israël » s"attire cependant les foudres de certains groupes juifs en soutenant, en 1980, au Collége oriental de Moscou, une thése de doctorat sur les « relations secrétes entre le mouvement sioniste et les dirigeants de l"Allemagne nazie ».
Mahmoud Abbas soutient dans cette thése, dont il fera en 1984 un livre trés controversé, que des dirigeants du mouvement sioniste ont collaboré avec les nazis lors de la Seconde Guerre mondiale pour augmenter le nombre de victimes juives et ainsi pousser la communauté internationale á soutenir la création de l"état d"Israël.
Il profitera d"une entrevue au journal israélien Haaretz, en mai 2003, pour s"expliquer sur cette affaire et se défendre des accusations de négationnisme á son égard.
L"architecte des accords d"Oslo
Au début des années 80, alors qu"il devient membre du comité exécutif de l"OLP, Abbas poursuit en coulisse son travail de rapprochement entre l"OLP et la gauche israélienne.
Tous ses efforts de rapprochement avec Israël le conduiront á devenir l"un des principaux négociateurs secrets d"éventuels accords d"Oslo dont il sera présenté par la presse internationale comme le véritable architecte. En 1993, Mahmoud Abbas accompagne Yasser Arafat á Washington pour la ratification historique des accords d'Oslo.
C"est d"ailleurs dans la foulée de ces accords que Mahmoud Abbas accroít considérablement son influence politique, au point de devenir le bras droit de Yasser Arafat.
Non á l"Intifada
Abbas, qui vit entre Gaza et Ramallah depuis son retour d"exil en 1995, s"oppose rapidement á la militarisation de la seconde Intifada, estimant que cette solution « n"a pas fait ses preuves ». De nombreux observateurs notent par ailleurs que l"opposition de Mahmoud Abbas á la lutte armée viendrait tout simplement d"une déduction logique.
En effet, Abbas, grand partisan du pragmatisme politique, estime que les groupes armés palestiniens, malgré leur volonté á toute épreuve, ne peuvent vaincre militairement une armée israélienne numériquement et matériellement beaucoup plus forte. Ainsi, La seule option viable reste la négociation avec le pouvoir israélien.
C"est d"ailleurs dans cet esprit qu"Abbas, avec l"assentiment de Yasser Arafat, multiplie en 2003 les rencontres discrétes avec le premier ministre israélien Ariel Sharon ou encore avec le fils de ce dernier, Omri Sharon.
Bref passage au poste de premier ministre
Quelques mois plus tard, en mars 2003, le président Arafat céde aux pressions de la communauté internationale, qui voit d"un mauvais oeil l"accumulation du pouvoir palestinien entre les mains d"un seul homme, et nomme Mahmoud Abbas au poste de premier ministre.
Cependant, le climat entre les deux hommes dégénére rapidement, en raison du refus systématique de Yasser Arafat d"accorder á son premier ministre un réel pouvoir sur les forces de sécurité palestiniennes.
Si Mahmoud Abbas croit avoir maté le vieux chef en lui arrachant, au terme d"un long et pénible bras de fer, le droit de choisir ses ministres, le conflit aboutit dans une impasse á l"automne 2003 aprés qu"Abbas se fut rendu compte qu"il ne contrôlerait jamais, sous la présidence de Yasser Arafat, les forces de sécurité.
Le 13 septembre 2003, Mahmoud Abbas démissionne de ses fonctions de premier ministre. Il quitte ainsi la scéne politique palestinienne, pour n"y revenir qu"aprés le mort d"Arafat et lui succéder á la tête de l"Autorité palestinienne.
YASSER ARAFAT
LE COMBATTANT SOLITAIRE
« Je finirai peut-être en martyr, mais, c'est sûr, l'un ou l'autre de nos garçons ou de nos filles brandira le drapeau de la Palestine sur les murs de Jérusalem, sur les minarets de Jérusalem et sur les églises de Jérusalem. […] Nous marchons par Jérusalem, des martyrs par millions. »
Militant, dirigeant militaire, « combattant de la liberté » pour les uns et terroriste pour les autres, homme politique, symbole, l'homme au keffieh a porté bien des chapeaux. Plus que quiconque, il a éveillé le monde á la cause palestinienne, qu'il porte á bout de bras depuis prés de 40 ans.
Celui qui a officiellement laissé tomber les armes pour la négociation, il y a plusieurs années, n'est plus aujourd'hui un interlocuteur valable aux yeux des Israéliens. Un credo maintenant partagé par Washington, qui fait de son départ une condition préalable á la création d'un état palestinien indépendant. Depuis des mois, ce militant de premiére heure voit les difficultés se multiplier et s'ajouter á la série d'obstacles qui ont jalonné son long parcours. Isolé, discrédité, Yasser Arafat entend pourtant poursuivre sa mission: créer un état palestinien indépendant, avec lui á sa tête.
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